Le Motif albertine est une suite de sept petits textes formant un ensemble énigmatique, liés par la reprise de mêmes motifs – la troublante apparition d’une jeune fille, deux collines et leurs terrasses – ou d’une même séquence de texte – cette interrogation sur « l’image totale de la lissitude totale, totale ». Écriture du pli, de la coupe, du retour et de l’esquive. Le Motif albertine d’Éric Suchère interroge la possibilité de transcrire la fascination d’un homme – « la fascination que la serveuse exerce sur moi », par exemple –, la difficulté de ne pas être prisonnier d’une image troublante que l’écriture ne pourrait que figer. Retard, retour, hoquets du mouvement du texte, reprise en « fictions-mots » d’un événement dont on redoute la perte, forment l’attraction même d’un texte insaisissable qui semble vouloir « dire un sentiment de beauté », sans le « corrompre ».
Pierre Hild, Le Matricule des anges n° 40, septembre-octobre 2002