N° 318 (mars 2024), La guerre

Il s’est passé quelque chose. Il se passe quelque chose. C’est la guerre, la dérive, la guerre, le des­tin. Mes cica­tri­ces ne se voient pas. Les drames ne peu­vent plus arriv­er. Tout le monde con­naît le sens des mots. Les mots dis­ent que je suis en dan­ger que je n’ai plus rien à per­dre, que suis arrivé, que je suis moi, que je dois repren­dre, encore, repren­dre. Je suis revenu. Je voulais écrire. Je n’ai plus besoin d’expier. Tous les actes sont dés­espérés. Je reprends, énumère : mau­vais­es herbes, la foi sans fin, ton vis­age, la nuit dernière, l’idiotie. Il s’est passé quelque chose. Il se passe quelque chose. Je suis endor­mi dans la vil­la. Je suis au cen­tre. Je suis au cen­tre de tout. J’ai vu tes yeux le jour de l’exécution. Tu t’es age­nouil­lée et tu as souri. J’ai vu tes yeux au cen­tre de tout cela. J’ai vu le cen­tre, les yeux, le jour de sa mort… quand quelqu’un a pris sa place et a pleuré. Alors, j’ai foulé le sol. Je suis tombé plusieurs fois. Je tombe plusieurs fois. J’ai men­ti. J’ai crié : « Je ne peux pas répon­dre. Je ne peux pas me suiv­re. Je ne suis pas. Je ne peux pas répon­dre. Je suis né inver­sé ». J’ai pour­suivi : « Dis­ons que je n’ai pas le droit, que lun­di a dis­paru, que je suis assis sur une branche du mar­ronnier , que les mots se suiv­ent : passe­port, chaus­sures, feu de paille, aigle, dia­mants… » Je ne peux pas m’en empêch­er. Je n’ai pas d’autre choix que de leur racon­ter. Je n’ai pas le droit à l’erreur. Je sais que quelque chose ne va pas. Je ne peux pas tout don­ner. Je ne peux pas tout don­ner. C’est tout ce que j’ai tou­jours voulu dire. C’est le mes­sage que j’ai envoyé. Il n’y a rien à racon­ter. Il n’y a rien à voir. Il n’y a rien à racon­ter. Il n’’y a rien à voir. Je meurs aus­si. J’essaie. Je t’oublie. J’essaie. Je meurs aus­si. Il n’y a rien à racon­ter. Il n’y a rien à voir. Je m’écroule. Je t’oublie. J’essaie. Je meurs aus­si. J’essaie. Je meurs aus­si. Je meurs aus­si. J’essaie de. Je meurs aus­si. J’essaie.