N° 247 (avril 2018), Entends
Entends. Fais ce que. Reste sans bouger. Fais ce que en retenant ton souffle et, t’étant reconnu, reste qui tu es. Reste dans. Reconnais toi et reste avec toi-même jusqu’à ce que rien ne demeure des choses niées par toi, qui ne sont cependant pas – ne sont pas. N’abandonne pas si vite. Ne le fais pas. Refuse d’imaginer. Ne disparais pas. Reste ici, immobile. Translate-toi. Soustrais-toi au mouvement – quoiqu’à peine. Soustrais-toi à la lumière se dissipant déjà – s’agit-il de cela. Soustrais-toi à rien. N’effectue pas ce qui s’efface. Soustrais-toi à cela, à la chose même. Retiens-toi. Rappelle-toi. Rappelle-toi. Respire. Bafouille. Surgis puis efface-toi. Prends congé comme il se doit. Laisse tout derrière toi. Disparais de tout souvenir. Deviens fumée. Supprime les lignes, les mots mutilés. Convoite la vue même qui t’est offerte. Ne parais plus. N’objecte rien contre. Referme-toi dans la marge, dans sa fluctuation, telle que se reflète en elle-même, se perd en elle-même, n’est jamais autre. Ne cède à ce que ne vois pas si quelque chose bouge, si un frisson parcourt l’herbe ou qu’une paupière cligne. Épuise-toi en un seul mot. Accroche-toi à tout ce qui est déjà décomposé. Tiens-toi immobile maintenant. À présent, recommence de nouveau comme n’est pas en toi. Répète dans la lenteur. Retiens-toi. Interromps-toi s’il n’existe rien d’autre, si cela ne peut cesser, si peux rester ainsi. Scrute. Déshabitue-toi. Évapore-toi. Égare-toi. N’ajoute rien comme rien ne manque, comme il n’y a plus rien à, plus rien pour, que cela s’arrête tout seul, que s’abolisse en un souffle et que s’épuise. Commence à parler de temps en temps, rien que pour le bruit déjà. Pense à. Prononce les noms. Vois la signification de la phrase. Vois la phrase dans la signification, depuis qu’elle a été pensée. Arrête.